«Comment je suis redevenu chrétien» de Guillebaud

«Comment je suis redevenu chrétien» | Jean-Claude Guillebaud | Albin Michel | 2007 | ISBN: 2226175075

Jean-Claude Guillebaud , écrivain, journaliste, penseur, partage son cheminement spirituel. C’est un petit livre qui se lit bien et qui amène à réfléchir. Réfléchir sur la place su Christinianisme dans notre société. Il cherche à abattre les murs de préjugés et de revaloriser la « vraie » foi.

Présentation de l’éditeur
 » Ma démarche ne participait ni de l’effusion mystique, ni de la nostalgie, ni même de la quête spirituelle, comme on dit maintenant. C’est d’abord la raison qui me guidait. Par elle, je me sentais peu à peu ramené au christianisme. Cette réflexion a d’abord été très périphérique par rapport à la foi, puis les cercles de ma curiosité se sont rapprochés du noyau central, celui de la croyance proprement dite. J’en suis là. Je ne suis pas sûr d’être redevenu un « bon chrétien », mais je crois profondément que le message évangélique garde une valeur fondatrice pour les hommes de ce temps. Y compris pour ceux qui ne croient pas en Dieu. Ce qui m’attire vers lui, ce n’est pas une émotivité vague, c’est la conscience de sa fondamentale pertinence. La rétractation d’une telle parole dans l’enclos de l’intimité – se taire ! – me semblerait absurde. La laïcité véritable, ce n’est pas la peureuse révision à la baisse des points de vue, c’est leur libre expression dans un rapport robuste et apaisé. « 

Voici quelques passages qui m’ont particulièrement frappé que j’ai retenu.

De cela je suis dorénavant persuadé. Je serai même tente d’ajouter que, si le christianisme donne l’impression de disparaître, c’est peut-être justement- et aussi- parce qu’il a rempli historiquement son rôle et que le message dont il était porteur a été grosso modo adopte dans sa version séculier par la société moderne. Adopté mais coupé de sa source… […] « C’est ce qui reste de chrétien en elles qui empêchent les sociétés modernes d’exploser » écrit René Girard.

Lorsqu’on m’invite à faire des conférences dans les milieux catholiques, protestants ou juifs, je suis embarrassé. J’ai envie de dire à ces gens qu’ils «dorment sur un trésor », mais je sens bien ce que peuvent avoir de ridicule ces proclamations apologétiques venues de l’extérieur. Et, pourtant, je suis bel et bien convaincu qu’il y a là un trésor, en effet, qu’il s’agirait de retraduire avec les mots et les concepts d’aujourd’hui.
La démocratie n’a pas été conquise seulement « contre » le christianisme, mais aussi grâce à lui, dans son prolongement, en intégrant et laïcisant son héritage.
Nous sommes bel et bien, nous Occidentaux, les héritiers de la Bible ET d’Athènes. Les deux furent et demeurent conjoints. Nous. Nous sommes construits dans cette tension perpétuellement reconduite et réinterrogée entre le croire et le savoir, la fois et la raison.
Citant Jean XIII : «Nos textes ne sont pas des dépôts sacres mais une fontaine de village». Une fontaine à laquelle chaque génération vient s’abreuver, en buvant une eau sans cesse différente, en redonnant vie à la fontaine.
L’ennemi – l’infâme de Voltaire – que vous pourfendez n’est pas le christianisme, mais sa version distordue, instrumentalisée.
Que l’Église catholique ait perdu sa richesse, son omniprésence et sa puissance rend assez risible l’anticléricalisme façon IIIe République qui renaît dans nos sociétés, mais cela ouvre peut-être la voie à un extraordinaire rajeunissement du christianisme.
Quant aux moqueries, aux tracasseries, aux relégations médiatiques, voire aux haines récurrentes auxquelles s’exposent les croyants en agissant ainsi, convenons qu’elles font sourire comparées aux persécutions du passé ou même à celles qui perdurent dans d’autres parties du monde. Être traité de «réac» dans Charlie Hebdo, ce n’est pas tout à fait la même chose que d’être livré aux lions par Néron en l’an 64 ou par Dioclétien en 304.
Les Chrétiens doivent réapprendre le bonheur de vivre, y compris la joie du corps. Ils ne doivent à aucun prix redevenir moralisateurs à la triste figure qu’ils furent trop fréquemment dans l’Histoire. […] Hommes et femmes têtus dans leur foi, sentinelles aux remparts, porteurs d’espérance engagés dans la cité: c’est la rencontre de ces chrétiens opiniâtres qui m’a entrainé plus avant dans ce «deuxième cercle», celui de la subversion évangélique. […] C’est d’abord en songeant à tous ces chrétiens colletés à l’engagement quotidien contre la «méchanceté» dont parlent les Psaumes, que j’ai tenté de mieux réfléchir aux mécanismes de la croyance et de la décroyance, y compris religieuse. L’une d’entre elles tient en peu de mots: la croyance passe AUSSI par la relation. La croyance solitaire, autonome, nomade qu’invoque à tout propos le discours sociologique contemporain, n’existe pas. […] Nous avons besoin de l’institution mais il nous faut apprendre à résister à son autorité.